Message du président : Au sujet du projet de loi C-13

joe ortona
Montreal - vendredi, juin 9, 2023

J’ai adressé des lettres à chaque membre du Sénat du Canada au sujet du projet de loi C-13, exhortant les sénateurs à remplir leur rôle en posant un « second regard objectif » et à proposer des amendements pour garantir le respect des droits des communautés linguistiques minoritaires au Canada.

Voici une copie de la lettre.

Les commissions scolaires jouent un rôle essentiel dans la vitalité de la communauté d’expression anglaise du Québec.

À ce titre, la Commission scolaire English-Montréal (CSEM) est au premier rang dans la défense de notre communauté, la promotion de notre contribution à Montréal et au Québec, et la défense de nos droits constitutionnels. Entre autres, nous avons lancé des contestations judiciaires pour nous opposer aux dispositions de la loi 40, qui contrevient à notre droit « de gérer et de contrôler » notre système scolaire; de la loi 21, qui nous empêche d'embaucher des enseignants et du personnel qui portent des signes religieux; et de la loi 96, qui modifie la Charte de la langue française et fait du Québec une zone où la charte ne s’applique pas.

Notre communauté considère depuis longtemps le gouvernement canadien comme le défenseur de nos droits et libertés. Dans le contexte actuel, nous sommes très préoccupés par certains éléments du projet de loi C‑13 : Loi modifiant la Loi sur les langues officielles, édictant la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale et apportant des modifications connexes à d’autres lois. Comme il est expliqué dans une lettre signée par près de 3 000 Québécois (https://qcgn.ca/fr/lettre-ouverte-aux-parlementaires/), « Cette nouvelle loi abandonnerait un demi-siècle de politique en matière de langue officielle, fondée sur le principe selon lequel les langues officielles et les communautés de langue officielle en situation minoritaire disposent de droits égaux devant la loi. Elle transformerait la Loi sur les langues officielles, une loi quasi constitutionnelle, en une législation visant à protéger et à promouvoir une seule langue officielle - le français - tout en négligeant les droits linguistiques de 1,3 million de Québécois d’expression anglaise. »

L’incorporation par renvoi de la Charte québécoise de la langue française dans la loi fédérale représente une grave lacune dans ce projet de loi. Telle que modifiée l’année dernière par la loi 96, la Charte contient maintenant l’utilisation préventive de la clause dérogatoire de notre Constitution, qui permet aux gouvernements de déroger aux droits garantis par la Charte des droits et libertés.

La CSEM s'oppose à la mise en place d'une structure juridique importante telle que C-13 - où les droits constitutionnels seraient différents dans une province par rapport à toutes les autres et où, comme l'a dit au Comité Julie Boyer, sous-ministre adjointe, Patrimoine canadien, la conséquence de l'inclusion de la Charte de la langue française du Québec dans le projet de loi C-13 « est que la législation fédérale serait assujettie à une loi provinciale ». Il s'agirait également d'une structure en vertu de laquelle d'autres provinces pourraient être libres de légiférer leurs propres restrictions sur les minorités de langue officielle.

Ces préoccupations ont été prises en compte par l’ancien juge de la Cour suprême Michel Bastarache devant le Comité sénatorial des langues officielles en octobre 2022 :

« Je suis personnellement opposé à la référence à une loi provinciale dans la loi fédérale, a-t-il déclaré. Je crois que le régime linguistique fédéral est très différent de celui du provincial. Le rôle du commissaire aux langues officielles ne ressemble en rien au rôle de l’Office de la langue française. Je ne voudrais pas voir les institutions fédérales faire l’objet d’enquêtes de l’Office de la langue française sur leur conformité à des obligations qui découlent de lois québécoises qui n’ont pas été adoptées par le Parlement fédéral. »

Le projet de loi ayant maintenant été renvoyé au Sénat pour examen, nous vous exhortons, vous et vos collègues, à remplir votre rôle de « Chambre de second regard objectif » et à proposer des amendements au projet de loi C-13 afin de garantir que les droits des communautés linguistiques minoritaires de ce pays ne s'excluent pas mutuellement, que le français reçoive le soutien et la protection qu'il mérite, et que les Québécois d’expression anglaise soient libres de jouir des droits historiques et de l'accès aux services qu'ils méritent.

Nous serions heureux de pouvoir vous rencontrer et de nous présenter devant le Comité des langues officielles. N’hésitez pas à communiquer avec moi si vous avez des questions ou des préoccupations.

 

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